J & A par Antoine Seiter et Marc Faysse
extrait de la nouvelle

Graphisme : Sébastien Riollier
Couverture souple à rabats
21x26 cm, 128 pages - Août 2022
ISBN 978-2-9572072-2-0

PLUS D’INFOS

Antoine Seiter est né dans un village du Loir-et-Cher. Pendant ses études, il revient régulièrement chez ses parents et commence à photographier sa sœur cadette, Julia (J). Le projet, débuté en 2008 se poursuit encore aujourd'hui. Ce livre imprime une étape, une douzaine d'années témoignant de l'enfance, l'adolescence et du passage à l'âge adulte de sa sœur. La séquence est marquée par un accident, les changements du corps et le travail. Elle témoigne surtout de la relation entre le photographe et sa sœur. Ce face à face nous dévoile les multiples facettes de son visage, l'ouvert et le fermé. C’est à dire la capacité du visage à se connaître, reconnaître et dialoguer avec l'autre.

C'est également d'altérité qu'il est question dans la nouvelle de Marc Faysse, autre versant du livre. L'auteur propose une histoire d'amour estivale entre deux jeunes hommes, Achille (A), c'est lui le narrateur, et Augustin. L'ambivalence de la nouvelle réside dans la façon dont les interactions entre Achille et Augustin témoignent de leurs sentiments mais aussi de leurs choix de vie. La fierté homosexuelle d'Achille est un vecteur d'émancipation qui finit par avoir raison de l'idylle amoureuse.

Achille rejoint Julia, en plongeant dans l'âge adulte, il et elle nous questionnent dans notre rapport au monde.

Presse
PhotoBook Journal (en anglais)
PALM

Les éditions Nouveau Palais proposent depuis 2020 des livres de photographie documentaire. Chaque série d’images est accompagnée d’un texte venant apporter un angle aussi différent que pertinent avec le sujet abordé. Nos choix défendent une photographie et une littérature politique aux revendications égalitaires.



Crédits du site internet
Design : Juliette Duhé et Sébastien Riollier
Programmation : Élie Quintard

Ce soir-là, je l’ai vu pour la première fois. Le bois dans lequel je campe sans autorisation est protecteur et effrayant. Il n’est pas rare que des campements comme le mien soient l’objet de dénonciation de la part des estivants, heureux propriétaires de maisons secondaires. Notre présence à nous, les travailleurs de l’été, semble leur faire du tort, leur gâcher le paysage. C’est donc un réflexe : dès que j’entends du bruit, la nuit tombée, j’entre dans la caravane en silence afin que l’on croit l’endroit abandonné. Par bonheur, cela n’arrive pas souvent, mon coin est au fond d’un cul de sac, en contrebas d’un talus que personne ne franchit. La pâleur du ciel de la mi-août arrose la cime des arbres et je songe aux pages que je viens de lire quand un son me parvient depuis les profondeurs de la forêt.
Il s’approche dans un bruit diffus de buissons qu’on écarte, accompagné par le frissonnement des feuilles bousculées par le vent côtier. C’est un groupe : je perçois des voix étouffées. Comme mon campement est, malgré son isolement, au bout d’un chemin, il y a une sorte de fatalité dans notre rencontre. Je suis pris de la panique de ceux qui sont seuls et face à une situation inconnue.
La conversation se rapproche. Je vois les lumières des téléphones portables osciller dans l’obscurité. Ils sont quatre. Deux garçons et deux filles. Je suis figé tandis qu’ils arrivent. Je jette un oeil sur la table de camping éclairée par la lampe à huile de la caravane : les restes de mon dîner, des boites de conserves ouvertes.
Ils sont désormais à l’orée de ma petite clairière.
« Attends, il y a quelqu’un, fais gaffe, Augustin.
— Mais c’est bon, il n’y a jamais personne ici. »
« Bonjour », je dis.